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dimanche 25 août 2013

Koh Lanta. La fin ?

Je  viens d'apprendre la terrible nouvelle. Un candidat de Koh Lanta est décédé d'une crise cardiaque  lors de la première épreuve de l'édition 2013. C'est terrible et je vois déjà flamber les bons mots dans les medias sur la télé-réalité et ses possibles dérives :

Il y a une dizaine d'années débarquaient brutalement ces indigentes émissions dites de télé-réalité dans nos foyers comme autant d'intrus malveillants, de malins rejetons qui ne s'invitaient que pour mieux nous couper le souffle, l'intelligence avec, nous entraînant toujours plus bas dans la cale des sentiments. Tout au fond. Auraient-elles fini par avoir notre peau, nos yeux, notre imagination, nos pensées ? A les regarder, nous serions-nous habitués à la médiocrité ? Et bla bla bla, et bla bla bla.

Mais il ne faut pas devenir amnésique... Ce genre de drame peut hélas arriver, c'est pourquoi je veux défendre ce concept. Parce qu'il serait trop simpliste d'amalgamer à la sauvette. Parce que Koh Lanta recèle au contraire de toutes les autres des trésors d'intelligence et d'inventivité, d'imagination suscitée, pouvant largement expliquer son succès ainsi que les raisons pour lesquelles tout le monde y parut trouver son compte.

Me revient en préambule l'aspect cotonneux du rêve d'Enki Bilal préfigurant des combattants du futur, tour à tour impitoyables boxeurs et fins tacticiens, évoluant avec la même aisance sur un ring ou sur un échiquier, troquant allègrement d'efficaces bourre-pifs pour de savants calculs mentaux. But avoué : accoucher d'un héros complet. Homme ou femme. 

Même chose dans ce jeu télévisé. Plusieurs belles oppositions en pimentent le déroulement. Un clivage qui tour à tour ou simultanément peut s'opérer sur les plans suivants :

Sexe (homme / femme) ;
Famille, Clan (jaune / rouge) ;
Force Physique (fort / faible) ;
Tempérament (leader / suiveur) ;
Implication sur le camp (peu impliqué / travailleur) (individualiste / esprit d'équipe).

On pourrait ajouter une notion de Classe sociale qui perdure, même sur une île du bout du monde, même lorsqu'on est décharné, épuisé, effacé derrière des bannières censées redéfinir les frontières sociales de ce nouveau monde. Egal devant le dénuement.

C'est l'enchevêtrement de ces nombreux paramètres qui fit que chaque semaine, on laissa vagabonder son esprit, imaginer lequel des acteurs serait le plus à même d'aller loin, et si oui en combien de "coups", par quelles stratégies opportunes...

L'observation prouve notamment qu'un ingrédient essentiel pour aller au bout de l'aventure consiste à :

1 faire partie de l'équipe la plus forte dans un premier temps pour éviter toute élimination prématurée. Ce qui permet également de se réserver la part du lion (supériorité numérique) lors de la réunification.

2 à se rendre indispensable au sein de son clan sur le plan de la survie et/ou de ne pas apparaître comme le "maillon faible" lors des épreuves physiques lorsque son équipe est en infériorité au cours du premier temps de l'émission (opposition clanique, jaune contre rouge).

3 à faire montre d'une implication "mesurée" dans les épreuves de force une fois la réunification actée, sachant que les plus forts font généralement l'objet d'alliances précoces pour les éliminer dès que chacun doit se battre pour soi et plus pour son équipe.

4 à être attentif après les réunifications aux nouveaux équilibres de force (nombre de femmes / au nombre d'hommes notamment) et à la nature des "votes noirs" laissés par un candidat sortant qui peut bien sûr avoir une incidence sur des stratégies.

5 à éviter d'apparaître comme un meneur d'hommes et de femmes, ou comme quelqu'un de caractériel. Une discrétion alliée à un sens de l'écoute et une fidélité à un noyau dur de compères est un ingrédient central de la réussite dans cette entreprise.

C'est apprendre au gré des jours à faire évoluer le dosage de ces ingrédients en fonction des évènements du jeu qui permettra de louvoyer habilement jusqu'au sommet. Inch'allah.

Pour le spectateur que je suis, c'est une mécanique intellectuelle à la fois stimulante et sans fin. Je vais même plus loin. J''aimerais comme un ordinateur pouvoir tracer le chemin scénaristique idéal, le plus passionnant, celui qui ménagerait le plus grand des suspenses chaque semaine, le faisant progresser pallier par pallier jusqu'à une apothéose légitime, pour essaimer le fil narratif de l'aventure de vrais rebondissements comme des clifhangers, déclencheurs d'autant de teasings de génie d'un épisode l'autre.

Je rêverais en d'autres termes de savoir comment reprendre la main sur le déroulement pour l'optimiser ! Je me doute bien que c'est ce que les producteurs ont commencé à faire avec l'idée récente de colliers d'immunité disséminés ici et là sur l'île - facile ensuite de tendre des perches, de faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre en glissant des indices à certains candidats menacés d'exclusion pour une décision pouvant briser l'équilibre des forces en présence et partant le suspense des épisodes à venir, par conséquent l'audience, nerf de la guerre de l'audimat. Personne n'est dupe.

Mais ce qui vient d'arriver, n'était évidemment pas prévu... Koh Lanta est peut-être mort au Cambodge. Mais moi je dis envers et contre tous : Vive Koh Lanta.
  

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