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vendredi 17 mai 2024

Oraison vers le large. 1998

 



Un brumisateur géant

Pour tuer la torpeur :

Voilà le doux songe

Qui soulage mon âme.

J’inspire fébrilement

Tout au bord de ma nuit.

Le Limpopo, son râle

Je l’entends déjà qui ronfle

Chant brodé de plic et de ploc

Entrelacés, venus

Mourir à mes pieds.

De ses entrailles,

Le fleuve exhale

Un souffle indocile

Comme les effluves

D’un ventre brûlant.

Une pluie fine enfin.

M’envelopper alors,

Me mêler le corps

Aux bruissements

Dans mes oreilles, 

Ma piste aux étoiles,

Mes acouphènes.

C’est le signal, j'entre en scène

Il siffle, il brûle mon sang

M’enfoncer lentement

Dans les boues flasques,

De ces profondeurs que

Je ne peux qu’imaginer,

Mes jambes au-dessus d’un néant,

Indicible et noir océan,

Où tout se consume

Les os

Les yeux

La viande

Les souvenirs peut-être.

Et la pluie qui s'entête. 

Dérive bonhomme, dérive,

Ne crawle pas, fais toi petit,

Tout petit dans la noirceur suffocante

Où toute vie étend son règne abyssal.

Les grands prédateurs n’ont qu’à bien se tenir,

Parole de fou, ça va saigner par ici

Et ce ne sera même pas télévisé

Tiens, j’en entends un quitter la berge.

Crocodile ?

Hippopotame ?

Peu importe,

Il me veut pour lui tout seul,

Caressera bientôt mes chevilles lestes.

Oublié mon couteau japonais, pas grave

Je m'en vais tordre le cou aux idées reçues

Mordre au cœur l’animal. M’en faire un sac.

Le regarder se soumettre

Lui déchiqueter le cuir de tout mon être

A l’effroyable mâchoire résister

De mes plaies ouvertes,

De mes chairs disloquées.

Qu’il m’aspire vers le fonds, je serai là

Moi, mes mots blessés

Qu’il me traverse, Qu’il m'éparpille,

La beauté de l’instant fera tout oublier.

Et puis rien. Il n'y eut rien ou si peu.

C'est donc l'homme qui a peur

Son imagination dans le noir.

Allez, bouge, nage, nage,

Accélère petit homme,

Affûte l’oraison,

Aiguise l’épitaphe,

déguerpis,

Sois pierre à fusil

Deviens l’extrême soif

Et de creux en creux

Jusqu’à l’océan

Rebondis,

Nu comme le ver

Rends l’âme,

Revis,

Ouvre les yeux,

Exulte, heureux

Comme au premier jour :

« Terre ! Haute-Volta ? Zaïre ? »


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